& les Chroniques
Express
Anatoly Grindberg & Mark Spybey
"123 m"

"123 m"
[Ant-Zen]
par Bertrand Hamonou
DATES | Sorti le 27 mai 2019 | Publié le vendredi 13 décembre 2019
ET ALORS | "123 m" (pour 123 mètres) est le disque d’une rencontre : celle du Russe Anatoly Grindberg (Tokee) et de l’Anglais Mark Spybey (Dead Voices On Air) le temps d’un voyage aux confins de la dark ambient, à la lisière de l’expérimental, de l’industriel et de la bande originale de film. Mélange subtil de field recording et de sons triturés pas toujours identifiés, l’ensemble se tient parfaitement et demande une attention toute particulière de la part de l’auditeur s’il veut s’immerger dans un monde fait de cris et de chuchotements, de rayons de lumière pâle et d’errances dans des terrains vagues. Ne venez pas y chercher des ritournelles à fredonner, ici c’est tout un univers parallèle qui vous est offert, parfois terrifiant et souvent très beau, comme la réalisation sonore d’un roman de Clive Barker. D’ailleurs il pourrait s’agir d'être plongé dans l’"Imajica" avec ses métamorphoses constantes et ses multiples allers et retours d’un monde à l’autre, que l’on s'y croirait pour de bon.

Hiro Kone
"A Fossil Begins To Bray"

"A Fossil Begins To Bray"
[Dais]
par Bertrand Hamonou
DATES | Sorti le 8 novembre 2019 | Publié le mercredi 11 décembre 2019
ET ALORS | Sur son troisième album, Nicky Mao aka Hiro Kone nous force à la concentration et nous invite à une démonstration de sa maîtrise des séquences rythmiques complexes au cœur de structures électroniques soignées. Coiffez un casque, fermez les yeux et laissez ces morceaux vous envahir tant ils semblent provenir de l’intérieur, s’appliquant à traduire à merveille le prolongement d’une observation, d’une angoisse, d’un doute, d’une décharge d’adrénaline. Impossible de se laisser distraire de cette profusion de sons d’un bout à l’autre du disque, l’Américaine nous offrant un habillage sonore de premier choix, d'une ingéniosité et d’une richesse rares. Il s’agit là d'une besogne digne de celle d’une colonie de fourmis digitales, allant et venant selon les aspérités d'un terrain cabossé par des rythmes façon coup de poing, et qui permettent à "A Fossil Begins To Bray" de se démarquer instantanément d'une production IDM trop souvent anesthésiée.

Moaan Exis
"Postmodern Therapy"

"Postmodern Therapy"
DATES | Sorti le 25 juin 2019 | Publié le mardi 24 septembre 2019
ET ALORS | Annoncé en mai par l’hallucinante vidéo du titre "Witness" qui ouvre de manière inquiétante "Postmodern Therapy", le second album de Moaan Exis s’impose comme une véritable machine de guerre de techno industrielle et rituelle. C’est d’ailleurs le visage peinturluré de rouge pour l’un et de noir pour le second que Xavier Guionie et Mathieu Caudron délivrent ensemble une musique musclée, truffée de trouvailles sonores astucieuses et de parties rythmiques boostées que les deux Français ont d’ailleurs baptisées "drum battles" lors de leurs lives. Au travers de son imagerie tribale, l’entité Moaan Exis cultive les mystères qu’un tel nom évoque, mais qu’elle sait cependant partager le temps d’un titre avec Caitlin Stokes du groupe Corlyx, digne d’être initiée. La mixité du chant rappelle d’ailleurs KMFDM, eux aussi habitués des albums lancés à cent à l’heure. Reste que "Postmodern Therapy" propose derrière une imagerie unique le son d’un nouveau monde sauvage, mi-humain et mi-animal, où ça hurle dans le micro et ça tambourine sur les fûts pour un résultat électro tribal et bestial.

Statiqbloom
"Asphyxia"

"Asphyxia"
DATES | Sorti le 7 juin 2019 | Publié le mardi 17 septembre 2019
ET ALORS | L'adage populaire assure que l'on ne choisit ni sa famille ni ses parents, mais dès lors qu'il s'agit d’appartenir à une scène musicale, c'est une tout autre histoire. Il y a bien entendu des filiations plus évidentes que d'autres, et dans le cas présent, les membres de Statiqbloom ont clairement choisi de se positionner en tant qu'enfants légitimes du Skinny Puppy de la seconde moitié des 80s… qui auraient passé leurs vacances chez Synapscape. Sur leur second album de dark électro à l'ancienne (garanti sans aucun son préprogrammé), les compositions raclent le plancher et accrochent le plafond pour un résultat véritablement organique, jusqu’à sa pochette servie par un serpent albinos rampant sur le logo du groupe réalisé en bois. Le duo de Brooklyn y démontre un savoir-faire que l'on ne peut que respecter, tout en dépoussiérant du même coup "Vivisect VI" et "Cleanse Fold and Manipulate" que l'on avait un peu dédaignés ces dernières années. Fort heureusement, "Asphyxia" est venu remettre de l'ordre dans nos priorités.

Supersimmetria
"Abiogenesis"

"Abiogenesis"
[Hands]
par Bertrand Hamonou
DATES | Sorti le 26 avril 2019 | Publié le jeudi 8 août 2019
ET ALORS | En cinq albums, dont les trois derniers pour le compte du label Hands, Armando Alibrandi continue de parfaire son électro mystique quelque part entre Zero Degree et Kangding Ray, dans un registre d’ambient industrielle cadencée sur des rythmes techno paisibles. Inspiré entre autres par la physique et le mystère qui entoure la naissance des étoiles, le musicien nous livre cette fois sa réflexion sur la création de la vie à partir de matière inerte : l'abiogenèse. Et se pose du même coup en docteur Frankenstein mettant au monde une electronica suturée et bouillonnante. Et c’est peut-être là sa propre définition de l'abiogenèse : permettre à des machines de libérer l'esprit humain, d'y provoquer des émotions et d'y faire naître des images mentales au moyen de couches sonores brodées autour de rythmiques mécaniques et binaires.

The Overlookers
"Teenage Wet Dreams"

"Teenage Wet Dreams"
DATES | Sorti le 5 avril 2019 | Publié le mercredi 31 juillet 2019
ET ALORS | Chez BOREDOMproduct on ne lésine pas sur les moyens lorsque le produit implique la majeure partie du personnel maison. Avec The Overlookers, l’attention va jusqu’à customiser la Cadillac de la pochette car chaque détail compte. Everything Counts donc, même si quelques compositions moins percutantes ("My Moogadillac" ou "Give Me More") seront vite oubliées. Derrière cette pop au vernis rétro-futuriste, c’est toute l’Amérique fantasmée des 50s qui passe à la moulinette d'une machine à (re)monter le temps, détournant époques et clichés. Le disque a l’allure d’un retour vers le futur de la synth-pop, et derrière le titre un peu coquin s’enchaînent des singles confirmés ("Dying Fast", "Prom Night") et potentiels ("No Delight", "Speak to the Devil"), avec le son reconnaissable des projets respectifs des deux principaux intéressés : JB (Dekad) et Pierre (Foretaste).

Metatron Omega
"Evangelikon"

"Evangelikon"
DATES | Sorti le 9 avril 2019 | Publié le mardi 18 juin 2019
ET ALORS | "Evangelikon" est le déjà quatrième album du projet serbe de dark ambient absolue Metatron Omega venu de Belgrade. Les sept longues plages qui le composent nous chuchotent les instructions secrètes à suivre pour descendre lentement au plus profond des entrailles de la croûte terrestre, où les râles d'outre-tombe se mêlent aux mouvements telluriques et mécaniques de quelques rituels sacrificiels anciens. Une cloche carillonne au loin dans la brume, on y devine des chants grégoriens entonnés au coeur de cavernes abandonnées, on visualise mentalement une procession de fidèles encapuchonnés scander des incantations mystiques dans une cathédrale souterraine à la gloire du Dieu païen Kosmokrator, où des mélopées indistinctes et inquiétantes guident leurs pas vers l'eschaton, la fin de toute chose. C'est ténébreux, c'est flippant, c'est magnifique, et on en redemande.

The Foreign Resort
"Outnumbered"

"Outnumbered"
DATES | Sorti le 5 avril 2019 | Publié le vendredi 14 juin 2019
ET ALORS | Il y a des disques qui ne laissent que peu de repos pour souffler entre les chansons. C’est le cas de cet "Outnumbered" lancé à deux cents à l’heure qui s’impose d’emblée comme une référence du genre auquel il appartient. Il y a quelques cinq années, le label Artoffact avait réussi à imposer le parfait crossover entre rock et électronique grâce à l’album "Fearless" des Islandais de Legend, et voici qu’il remet ça avec la new wave volontairement rugueuse de The Foreign Resort. Avec la voix très pêchue de son chanteur Mikkel Borbjerg Jacobsen, sa basse grosse comme ça, ses sons de synthés que New Order auraient certainement aimé posséder à l'époque de "Movement", et ses guitares tour à tour tranchantes et hurlantes comme des bêtes enragées, le disque est d’une puissance et une telle réussite que vous ne pouvez pas vous permettre de passer à côté ce printemps.

Blankenberge
"More"

"More"
DATES | Sorti le 10 avril 2019 | Publié le mercredi 12 juin 2019
ET ALORS | C’est une invasion venue de Russie, de Saint Petersbourg en particulier, qui inonde ces derniers temps les mondes du post-rock, du shoegaze et de la dream pop ; prenons Show Me a Dinosaur, Pinkshinyultrablast ou Blankenberge pour en citer que trois. Et si l'on a envie de s'attarder aujourd'hui sur Blankenberge, c'est parce que le groupe a su digérer, assimiler et transformer des influences qui nous ont accompagnés toute notre vie, de Slowdive à Pale Saints en passant par The Jesus & Mary Chain et une infinité d'autres. Mieux, ils sont su combiner toutes ces influences dans chacune de leurs compositions afin de redonner à ce son bourdonnant un vrai coup de fraîcheur, une énergie et une passion revigorante, et, caché derrière un mur de guitares, sensibilité et fragilité. Quant à savoir pourquoi ils ont choisi le nom d’une ville côtière belge, c’est une autre histoire.

Bombardier & Zeller
"Conditions of an Inhumane World"

"Conditions of an Inhumane World"
DATES | Sorti le 22 mars 2019 | Publié le lundi 6 mai 2019
ET ALORS | Le Français Zeller s'associe à l'Américain Bombardier le temps d'un EP quatre titres à la justesse millimétrée et qui fourmille de détails et de surprises sonores en double croches. L'un (Zeller) est un habitué des compositions qui clignotent comme l'intérieur du cockpit d'un avion de ligne, l'autre (Bombardier) aussi, lequel multiplie les projets (5th of July, Useless Generation) et s'est récemment essayé à l'ambient avec son dernier né, The Space Where She Was pour le compte d'Ant-Zen. Ensemble, ils nous délivrent un EP rusé et diablement efficace, proposant tour à tour des déflagrations électroniques et des danses sensuelles de câbles, le tout en apnée sous les profondeurs d’un sound design de premier choix, complexe et subtil. On espère un album plus long après cet excellent coup d’essai.










